Pour l’occasion, j’ai préféré tendre l’oreille en optant pour la version audio. Celle-ci est lue par Stéphane Ronchewski (que vous avez peut-être déjà entendu dans le jeu vidéo Mass Effect où il fait la voix française de Kaidan Alenko ; sinon il double assez souvent David Tennant en français mais je ne risquais pas de le reconnaître parce que David Tennant c’est la VO ou rien pour moi 😁), qui fait un excellent travail et qui est très plaisant à écouter.
Fondation est un cycle écrit par Isaac Asimov qui nous projette dans un futur lointain où l’humanité s’est installée dans toute la galaxie sous la forme d’un empire. Hari Seldon, un mathématicien de génie, prédit grâce à la psychohistoire que cet empire va s’effondrer et serait suivi par une période d’obscurantisme de 30 000 ans.
Celle-ci peut cependant être réduite à 1 000 ans si un petit groupe d’humains œuvre en coulisse afin de créer un nouvel empire : ce petit groupe, c’est la fameuse Fondation, située sur une planète éloignée du centre galactique, et qui prétend conserver le maximum de savoirs sous forme d’une encyclopédie.
Le Cycle de Fondation a été publié en plusieurs temps : tout d’abord, il y a une série de sept nouvelles et novellas publiées dans les années 40 dans des revues et reprises sous forme de trois livres dans les années 50. Il s’agit de Fondation, Fondation et Empire et Seconde Fondation. C’est de ces trois livres dont je vais parler.
Dans les années 80-90, l’auteur publiera deux suites (Fondation foudroyée et Terre et Fondation) et deux prequels (Prélude à Fondation et L’aube de Fondation) et fera en sorte de relier son Cycle des Robots au Cycle de Fondation. D’autres auteurs viendront également enrichir le cycle après la mort d’Asimov.
Certes, le concept est génial et on voit que cet univers a clairement inspiré des générations de créateurs (difficile de ne pas retrouver Trantor dans la planète Coruscant, pour ne citer qu’un exemple). Mais qu’est-ce que c’est aride ! Le format audio renforce cette impression avec lorsqu’on se rend compte que les trois premiers tomes, à quelques exceptions près, se résument à un interminable enchaînement de discussions de bureau avec de multiples protagonistes qu’on a parfois du mal à identifier à l’écoute.
Je comprends cependant pourquoi ce cycle est cité dans toutes les listes d’incontournables (anciens !). Bien sûr il y a les idées, mais aussi le fait qu’il est super facile d’accès parce que son écriture est très factuelle. Et si certains détails font bien rigoler aujourd’hui (comme cette obsession du nucléaire jusque dans les grille-pains), globalement l’ensemble tient encore bien, à part un point : la place des femmes.
C’est assez intéressant parce que j’arrive globalement assez bien à faire abstraction lorsque je lis des livres qui ont plus de 50 ans. Mais là dans Fondation ce n’est pas tellement l’absence de femmes (c’est limite préférable) qui dérange, mais plutôt le fait que les rares femmes présentes sont globalement écervelées et cantonnées à des rôles domestiques.
Je pense que ça me gênerait moins si l’auteur en lui-même n’était pas connu pour son comportement plus que déplacé à l’égard des femmes. Les deux éléments combinés mettent mal à l’aise même si cela n’empêche pas Isaac Asimov de sortir de temps à autre de son chapeau des personnages féminins un peu plus intéressants.
Cette lecture de Fondation m’a beaucoup fait réfléchir sur la question des classiques. J’aime l’Histoire, alors je ne pourrais jamais dire qu’il ne faut pas les lire, parce que j’aime bien comprendre comment on en est arrivé là. Et le « là » actuel de la SF est (en partie) le résultat de l’impact du Cycle de Fondation (au même titre que d’autres grands livres de cette époque).
Mais présenter comme Fondation comme une porte d’entrée à la SF aujourd’hui, c’est vendre une vision de la SF datée et un peu étriquée (bien que la série télévisée aie l’air de faire un bel effort sur la question des représentations et rien que pour ça j’ai envie de la regarder), alors qu’on trouve aujourd’hui des œuvres aussi ambitieuses, aussi vertigineuses et plus en phase avec nos préoccupations actuelles.
Fondation est donc un cycle intéressant, mais c’est bien de ne pas en faire non plus l’œuvre ultime de SF (existe-t-il seulement œuvre ultime dans un genre qui se réinvente sans cesse au gré de l’actualité ?).
Finirais-je un jour le cycle ? Je ne sais pas encore. C’est une bonne lecture estivale, qui se prête bien au format audio et je suis curieuse de voir jusqu’où l’auteur va aller. Et en même temps j'en ai encore pour deux à quatre tomes, c’est long pour un cycle qui ne m’accroche qu’à moitié, d’autant plus qu’on a un semblant de conclusion à la fin de Seconde Fondation. Ma foi, on verra bien l’été prochain…
En attendant, j’ai beaucoup râlé sur ce cycle mais je tiens à signaler qu’il y a une bonne raison de lire Fondation, c’est la novella Le Mulet dans Fondation et Empire. C’est peut-être le récit qui vient contredire tout ce que j’ai dit dans cette chronique : l’intrigue est prenante, y’a de l’action et du mystère, des personnages intéressants. S’il n’y a qu’un texte à lire, c’est celui-ci !
Infos utiles : Fondation, Fondation et Empire et Seconde Fondation (Foundation, Foundation and Empire et Second Foundation en VO) sont les trois premiers livres du Cycle de Fondation écrit par Isaac Asimov et publiés (sous cette forme) entre 1951 et 1953.
Les deux premiers volumes ont été traduits par Jean Rosenthal et le troisième par Pierre Billon. Les traductions ont été révisées par Philippe Gindre. Nombreuses éditions, la plus récente chez Folio SF avec des couvertures d’Alain Brion (reprises pour la version audio).
Les versions audios sont lues par Stéphane Ronchewski et éditées par Audiolib. Comptez respectivement 9h49min pour Fondation, 11h7min pour Fondation et Empire et 11h pour Seconde Fondation.
D’autres avis : L’affaire Herbefol (Fondation – Fondation et Empire – Seconde Fondation), Lorkhan et les mauvais genres (Fondation)
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