Émile Bravo est un auteur que je suis depuis longtemps. J’avais adoré sa série Une épatante aventure de Jules et je suis complètement tombée amoureuse de son interprétation personnelle de Spirou, le Journal d’un ingénu. Forcément, lorsqu’il a donné une suite à cette histoire qui se suffisait à elle-même, je n’ai donc pu que me jeter dessus, et maintenant que les quatre tomes sont sortis, il est temps de lui consacrer un petit article.
Le Journal d’un ingénu revisitait la jeunesse de Spirou à Bruxelles à la veille de la seconde guerre mondiale. L’espoir malgré tout, sa suite, met en scène Spirou et son entourage pendant la guerre, de 1940 à la Libération.Je vous avoue ne pas être une grande amatrice de récits sur cette période, d’une part parce qu’elle est surexploitée et d’autre part parce que le temps passant, je trouve de plus en plus difficile de lire des récits à son sujet. Mais j’ai fait une exception parce que je savais qu’avec Émile Bravo je ne serais pas déçue du voyage, et cela a été le cas.
Difficile de ne pas redire à propos de cette série ce que j’ai dit sur le Journal d’un ingénu. C’est un travail de réinterprétation brillant sur Spirou : Émile Bravo reprend le personnage, arrive à garder tout son âme et arrive à l’intégrer de manière réaliste dans un cadre historique, lui qui n’a jamais vraiment eu d’âge et qui selon les auteurs qui l’ont mis en scène, est de toutes les époques.
Ici, Émile Bravo fait le choix de mettre en scène un jeune Spirou qui n’est même pas majeur et qui vit l’Occupation au jour le jour. Il est loin d’avoir les clés pour comprendre tout ce qui se passe (le lecteur en sait souvent plus que lui), mais il a déjà chevillé au corps les valeurs qui feront de lui le héros que l’on connait.
Émile Bravo s’intéresse justement à ce qui fait l’étoffe d’un héros, loin de la figure habituelle du sauveur. C’est d’autant plus intéressant dans un cadre historique complexe où on a trop souvent opposé les gentils résistants aux méchants collabos sans faire dans la dentelle. Cette BD donne une version très nuancée de la période, et rien que pour ça elle mérite le détour (en plus du fait qu’elle se déroule en Belgique, ce qui change un peu du récit français).
Ce que j’ai aimé aussi, c’est le ton. Bien évidemment, on est sur quelque chose de plus sérieux que le Spirou « classique ». C’est même plutôt noir, avec des moments où on se retrouve les yeux sacrément humides. Pourtant il y a parfois un peu de lumière et même quelques des pointes d’humour. Et surtout, il y a un propos d’ensemble d’une grande intelligence et d’une incroyable justesse sur la guerre du point de vue de ceux qui la subissent.
Bref si vous aimez Spirou, cette version d’Émile Bravo est un incontournable à lire. C’est une œuvre superbe, autant pour ce qu’elle fait du héros en costume de groom que pour sa vision de l’époque, et je ne peux que vous la recommander. Quant à moi, j’espère trouver le temps de la relire d’une traite prochainement pour encore mieux l’apprécier.
Infos utiles : Spirou : l’espoir malgré tout est une série de BD d’Émile Bravo (avec des couleurs de Fanny Benoît) parue en 2018 et 2022 chez Dupuis. Elle compte 4 tomes (Un mauvais départ / Un peu plus loin vers l’horreur / Un départ vers la fin / Une fin et un nouveau départ) de 80-100 pages environ (sauf le dernier qui n'en fait que 50).
D’autres avis : Babelio (je vous ai mis le lien vers le premier tome pour vous éviter d’éventuels spoilers)
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